Si dans une structure comme la Ferme du Buisson il est nécessaire d’avoir une équipe permanente, salariée à l’année, pour accueillir et diffuser les compagnies, le secteur de la production de spectacles fonctionne depuis plus d’un demi siècle grâce à la discontinuité de l’emploi. À la fin d’une tournée, on dira toujours aux artistes et techniciens, embauchés pour l’occasion : "Merci et au revoir".
C’est pour cette raison qu’a été créé, en 1936, le régime spécifique des annexes 8 et 10 de l’assurance chômage, autrement dit le régime des intermittents. Si des salariés sont structurellement contraints de travailler de manière discontinue ; leur protection sociale doit être adaptée à l’alternance de périodes d’emploi et de chômage. Pendant longtemps, ce régime était juste parce qu’il produisait une forme très concrète de solidarité entre les différents acteurs de la chaîne.
Depuis 2003, de réformes en nouveau protocole, le système d’indemnisation, mutualisé et solidaire, devient un système capitalisé et crée des situations absurdes : plus un intermittent est payé, mieux il est indemnisé. Plus sa situation est fragile, plus il est précarisé. Dans un moment où la discontinuité de l’emploi qui caractérise l’intermittence s’étend à bien d’autres secteurs de l’économie, à une époque où 86% des embauches se font en CDD… les partenaires sociaux ne devraient-ils pas s’inspirer du modèle qu’a représenté l’intermittence, pour repenser un mécanisme de protection sociale adapté à cette nouvelle donne du monde de travail ?
C’est ce nous appelons de nos vœux, en nous associant aux actions menées par la coordination des intermittents et précaires d’Île de France, pour éviter que dans notre secteur comme dans beaucoup d’autres, on aboutisse définitivement au noir plateau.